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En Nouvelle-Calédonie, les actionnaires des usines de nickel dans le viseur

Il y a des chiffres qui ne passent pas. Alors que la cessation de paiements de Prony Resources, usine située dans le sud de l’archipel calédonien, pourrait survenir dès le mois de février, que l’entreprise ne paie plus ses factures d’électricité ni ses charges sociales pour tenter de pérenniser l’activité, le négociant en matières premières Trafigura, actionnaire à 19 % du complexe industriel, aurait tiré 126 millions d’euros en 2023 de la vente du nickel produit par l’usine, dont il détient les droits exclusifs de commercialisation, selon les chiffres avancés par le Syndicat général des travailleurs de l’industrie de Nouvelle-Calédonie (SGTI-NC). L’usine, elle, aurait perdu dans le même temps plus de 210 millions d’euros.
La faute ? Un pacte d’actionnaires déséquilibré, au profit de Trafigura, assure Calédonie ensemble (non-indépendantiste), dont le président, Philippe Gomès, n’hésite pas à parler de « désastre, alors qu’il y a trois ans, on nous a vendu à grand renfort de tambours et trompettes un nouveau modèle minier ». Si, en Nouvelle-Calédonie, le nickel est toujours politique, l’usine du Sud, théâtre de violents affrontements sur fond de campagne référendaire à la fin de 2020, est le dossier le plus sensible.
La survie de l’usine et le retour à un climat social apaisé ne sont dus qu’au tricotage, en 2021, d’un montage permettant au site d’être détenu par « 51 % d’intérêts calédoniens », dont des collectivités publiques. A la manœuvre, la présidente de la province Sud, Sonia Backès (Les Loyalistes, non-indépendantiste), ennemie intime de Philippe Gomès, qui se retrouve aujourd’hui en première ligne pour sauver ce qui peut l’être. Dans un communiqué conjoint diffusé vendredi, la province Sud, l’Etat et Prony Resources ont d’ailleurs annoncé être à la recherche d’un « nouveau partenaire industriel ».
Trafigura n’est pas le seul actionnaire à être pointé du doigt. Le groupe français Eramet, actionnaire majoritaire de la Société Le Nickel (SLN), pionnier du nickel en Nouvelle-Calédonie et premier employeur privé du pays, est aussi dans la ligne de mire du syndicat SGTI-NC. « Eramet a réalisé un bénéfice de 740 millions d’euros en 2022 mais ne veut plus financer la filiale qui, historiquement, l’a porté au sommet », tacle Glen Delathière, délégué syndical SGTI-NC à la SLN, faisant référence aux années fastes qui ont permis au groupe français d’investir massivement en Indonésie, le nouvel eldorado du nickel qui concurrence aujourd’hui la production calédonienne, tandis que la SLN est, elle, aussi au bord de la cessation de paiement.
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